mercredi 20 janvier 2010

Martine à la ferme


Il y a à présent pas mal d’années que j’ai débarqué dans une région perdue, au fin fond de la France profonde. Par hasard, en camping-car sillonnant les petites routes, nous avons eu un coup de foudre pour une charmante ferme, vendue presque rien. C’est ainsi que je suis devenue néo-rurale, ou boborale.

Découvrant avec admiration les valeurs de la vie à la campagne et surtout les valeurs des gens de la campagne. Nous avions une vieille voisine, que j’aimais tout particulièrement, je l’appelais « la petite sainte » et Camille la nommait « la vieille aux si beaux yeux ». Elle était née là, bien avant la guerre, avait arrêté d’aller à l’école au CM2, à la mort de sa mère,  aux désespoirs du maire et de l’instituteur, mais il n’avait pas le choix le père, il fallait s’occuper des petits.

Elle avait lu toute l’œuvre d’Henri Pourrat et se désolait que ses petits enfants n’y voyaient aucun intérêt, je souriais et lui expliquais que tout admirable que soit « Gaspard des montagnes » ce n’était pas franchement une lecture aisée. Ses petits enfants ont tous faits, par ailleurs de bonnes études. Elle devisait paisiblement avec tant de gentillesse, ni amère, ni même sévère avec le sort que la vie lui avait fait. Elle avait donné  tant et tant d’amour, et en recevait aussi. Elle touchait, il y a de cela une dizaine d’année une pension de moins de 600francs. Et me disait : 
« En ville je serais une miséreuse, mais là, avec mon bois, mon jardin, mes poules… »
Ses petits-enfants lui faisaient son potager. Elle était respectable et respectée de tous. Elle n’était pas une miséreuse, mais aucun élu ne pense jamais à elle, à eux,  à ces gens de la campagne. Ils ne pèsent pas lourds.

J’ai changé de maison de campagne afin d’abriter ma nombreuse couvée, et ai migré quelques kilomètres plus loin, dans un hameau ou vit outre Monsieur Henri dans la maison de ses parents, Madame Desprées et sa sœur, dans la vieille ferme ; un jeune ménage, Le plus jeune fils Desprées, Fréderic, sa femme  Laetitia et leurs deux petites filles : Gypsie et Esmeralda. Gypsie a sept ans, et l’été dernier je la faisais lire un peu tous les jours,  à la maison, Elle avait jeté son dévolu sur la collection des Martines et je revisitai ainsi un monde qui avait accompagné mes deux filles.

Elle choisit assez vite de lire « Martine à la ferme »





J’étais surprise de ce choix, car ce livre est très ancien, je préfére nettement » Martine se déguise », ou » Le Noël de Martine »,  plongées dans un monde de rêve (genre Disneyland)

Au fil de la lecture Gypsie semblait moins enthousiaste, elle ne comprenait rien à Martine,  L’épisode du câlin au petit lapin la laissait perplexe, je dus expliquer, que Martine n’y connaissait  rien aux fermes. Pour Gypsie un petit  lapin c’est de la nourriture qui pousse, rien d’autre.

L’immense majorité des français ignorent ce qu'est ce monde rural qu’ils admirent pourtant  et envient sans savoir. Les politiques vont encore les assassiner un peu plus avec la taxe carbone, la voiture est une nécessité absolue pour vivre à la campagne. Les maisons sont anciennes et  les travaux nécessaires pour un bon isolement  rendant possible du chauffage électrique (épargné par la taxe) impossibles à réaliser faute de moyens.

20% des français sont des « ruraux », ils ont un niveau de vie bien plus bas que les autres, et s’en accommodent, travaillent beaucoup  en trouvant cela naturel(ils font leur « bois » pour économiser le fuel, un potager, une bassecour  et quelques animaux les emmènent  presque à l’autarcie). Les campagnards   (ruraux?) ont besoin d’une part de notre compréhension et d’autre part d’une politique qui les écoute. Les taiseux ne font pas de bruit, ne cassent généralement rien, il n’y a pas de journalistes pour les défendre, les pieds dans la boue glacée. Cette minorité-là est pourtant un vrai désir d’avenir pour la France. Ecologistes avant l'heure, ils sont peut être une voie d'avenir.  A nous de ne pas l’oublier.

Les "campagnards" prennent la parole, internet est une vraie révolution pour eux.  A suivre: Journal  d'une ferme en Bourgogne , journal de Dum dum  céréalier dans la Beauce, Neocampagned'Emmanuelle Meyer, dans le Limousin, S'installer et vivre à la campagne

Aucun commentaire: