mercredi 7 juillet 2010

Nicodème


 Nicomède, 22 mois est mort noyé dans une fosse sceptique dont le couvercle de 15 kg a été probablement déplacé par ses frères âgés de 9,  7 et 5 ans ainsi qu’une de leur cousine dont l’âge n’est pas donné.

Mort accidentelle, juge le procureur La famille  est démolie, à vie. Les enfants surement aussi, car même si l’un d’eux a eu l’idée folle de déplacer cette dalle de béton de 15 kg, voire d’y pousser un enfant de deux ans, qu’ils devaient probablement « surveiller »  des enfants de cet âge n’ont pas une responsabilité complète de leurs actes.
Les responsables sont les parents et grands parents malheureux, qui arrivant en vacances souhaitaient regarder un match de la coupe du monde de foot. Ils allaient jeter un œil sur les enfants environ toutes les 5 mn.



Nicodème, photo L'Express

Nicomède a-t-il été trop collant, trop bébé, pénible de vouloir suivre les « grands » ? Les grands ont-ils simplement ouvert cette fosse en se  disant s’il est grand, il évitera bien ce piège ? Ont ils simplement joué en oubliant le tout petit?

Le procureur a fait savoir qu’il n’en dira pas plus, il a raison, les meurtres d’enfants sont  une horreur absolue. Tabous, bien des parents ignorent les pulsions de mort  que beaucoup d ‘enfants ont pour leurs cadets.

J’entends souvent : « Oh, il adore sa petite sœur ! »

Oui, il l’aime mais l’instant d’après il la hait, car elle lui a pris, son père, sa mère et de plus depuis  qu’il est « grand » on est bien plus impatient voire exigeant avec lui, simplement par fatigue. L’ambivalence des sentiments est courante, les petits refoulant leur haine que ne  peuvent accepter leurs parents.

Lorsqu’Alice était ado, une de ses amies, évoquait parfois le crime qu’elle aurait commis à deux ans, elle s’accusait d’avoir étouffé son petit frère de 4 mois avec un oreiller, ce souvenir la rongeait. Je connaissais la maman de cette jeune fille, elle avait effectivement perdu un bébé  lorsque Justine avait deux ans. Très ennuyée, mais poussée par la détresse de l’adolescente, je lui avouais le tourment de sa fille, elle devait savoir pour l’aider et cela quoi qu’ait fait Justine. Christine me raconta  alors les circonstances de la mort de son bébé, Justine était dans son  lit  à barreaux dans sa chambre, le bébé dans une autre chambre dans un berceau, ayant succombé à une mort subite du nourrisson. Nous expliquâmes toutes deux l’angoisse profonde de Justine par le fait qu’elle devait inconsciemment souhaiter la mort de son frère et avait peut être imaginé par la suite le passage à l’acte.

Je dus ainsi enfermer Yann  en posant un crochet en hauteur sur la porte, soumis tantôt aux câlins dévastateurs de Charlotte,  tantôt aux doigts dans les yeux, le jour où je la vis tenter de regarder le bébé en basculant le berceau, j’estimais que mon dernier n’était pas forcément Indiana Jones.

Par la suite je vis Valentin quatre ans, essayer de faire gagner à son petit frère le concours d’apnée dans le bain en lui maintenant la tête qu’il avait mis imprudemment sous l’eau, et cela au moins  à deux reprises.

Valentin ainsi que Charlotte sont des amours de personnes humaines parfaitement normales. Charlotte se tuerait pour protéger un enfant et je sais que Valentin mettrait également sa propre vie en danger pour sauver un petit.

Je ne serais pas surprise d’apprendre que les hommes primitifs étaient comme les coucous, tentés de se débarrasser de leurs puinés afin d’avoir plus de chance de survivre par un meilleur accès aux soins et à la nourriture. Les tabous expriment notre désarroi face à ce qui est pour nous inadmissible mais aussi, peut être parfois inévitable.  Une meilleure surveillance des enfants rendrait cependant bien des accidents évitables. Nous n’en sommes pas tous capables.

L’été dernier charlotte était au bord de la piscine avec Pierre et Sasha,  4 et 2 ans, elle  a demandé à son père, qui lisait sur un transat :

« Tu les gardes, papa, je vais juste chercher le goûter, je fais l’aller retour ! »

Lhom, levant les yeux :

« Oui, oui, ma chérie pas de problème ! »

Alice arriva sur ces entrefaites, et trouva Lhom plongé dans son livre, les deux petits courant autour de la piscine. Lhom avait vu qu’ils « étaient sages » et avait jugé le danger nul, il aurait entendu s’ils étaient tombés pensait-il, sauf que, plongé dans son bouquin, Lhom entend peu ! Mais sa conscience du danger est bien plus basse que nous les trois femmes de la famille, il n’y peut rien.

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