jeudi 21 avril 2011

La confrérie de la bonne mort.

Aujourd'hui, jeudi Saint a été un jour particulier pour moi, comme pour tous les chrétiens pensez vous, pas uniquement. Une promesse me lie aux morts,  depuis dix ans, je fais partie de la confrérie de la bonne mort. Cette confrérie est fort ancienne, et discrète, pas secrète mais discrète, je ne connais ses origines mais je les suppose millénaire.

Il y a quinze ans, environ, une de mes vieille voisine à la montagne, m'avait parlé de cette chaîne, incidemment, croyais je , puis elle m'expliqua un peu ce dont il s'agissait, et un jour elle me demandait enfin  de lui succéder dans cette confrérie, prendre sa place vacante.

Je ne sais pas toujours pas combien nous sommes, vivants ayant ces morts qui nous soutiennent , cette année encore je suis allée à la messe dans une autre paroisse que celle qui me lie à tous ces défunts. Une chaîne nous lie, chaque vivant en faisant partie à une communauté de morts en ayant fait partie, ayant chacun, choisis de leur vivant qui prendrait leurs places, ma Foi et mes prières sont l'espoir pour ceux de cette confrérie qui sont passés de pouvoir entrer au paradis, sur terre , il y a toujours quelqu’un qui prie pour eux.

Je ne pense pas prier comme ils le firent mais souvent je pense à eux, et parfois déjà à qui je donnerai le témoin.

Au début je trouvais l'espoir qu'ils mirent sur moi, insensé, trop lourd, et je savais que je n'arriverai pas à faire aussi bien que ceux qui m'ont précédés, à présent, apaisée, je sais que le cadeau est double, je ressens un soutien dans cette éternité de passants l'un au tombeau qui donne la main à celui vivant qui regarde aussi  la génération qui grandit.

Notre seule obligation, est d'aller à la messe, le Jeudi Saint.

Nous sommes tous de passage, et Pâques est le moment où on prend un peu de temps pour y penser et appréhender cette vérité.

Celle qui m'a passé le témoin est une sainte, une vraie, pas décrétée, une petite sainte qui illuminait la vie de ceux qu’elle croisait, une presque pauvresse disait elle en parlant d'elle, et moi je me souviens de son regard bleu dans lequel on voyait l'amour de Dieu.


Un jour j'irai dans cette paroisse de village, car un jour pour le Jeudi Saint une messe sera célébrée, chaque église de la paroisse immense s'ouvrent à tour de rôle. Serais je alors  la dernière de la confrérie? Nous reconnaîtrons nous? Il faut à présent que je suis plus mure, prendre le temps de savoir qui d'autre a ce privilège de savoir que la chaîne donne un parfum d’éternité.

8 commentaires:

Anne** a dit…

Oh là ! Ce message mériterait un long échange .... Je ne veux pas l'engager ici, il faudrait pouvoir parler de vive voix.
Je vous souhaite de belles fêtes de Pâques,
Anne.

Françoise... a dit…

Merci pour ce message !
Je ne connaissais pas du tout cette confrérie, mais elle a du sens.. et sans la connaitre, sans aucune obligation.. je la vis à travers ceux que j'ai accompagné lors de ce passage !
Je suis bien consciente que je porte un flambeau que chacun d'eux m'a donné.. et qui est cette flamme qui brillait dans leurs yeux

Je me sens surtout l'obligation de faire se perpétuer les valeurs auxquelles ils tenaient.

Anonymous a dit…

Sororum Morte Boni

Ladywaterloo a dit…

Ce message mériterait effectivement que l'on s'y arrête, l'enseignement des anciens est réconfortant. Bonne Pâques, à tous croyants ou non, Pâques est porteur de vie et d'espoir pour tous.

Anne** a dit…

Penser à ceux qui sont morts, oui, bien sûr. Conserver leur mémoire, les faire vivre. Savoir qu'ils nous accompagnent, et que bizarrement, ils sont parfois plus présents près de nous, morts, qu'ils n'étaient lorsqu'ils étaient vivants.
Cela dit .... La mort pour moi, reste un mystère, malgré tous nos efforts désespérés pour imaginer ce qui se passe "après". La mort est comme la surface d'un étang. J'essaie de voir le fond, depuis la rive. Mais tout est sombre, et m'est renvoyé mon propre reflet. Sur terre, nous n'avons d'autre référence que ce que nous connaissons, des pensées, des mots humains. La mort nous entraîne vers tout autre chose, que nous ne pouvons appréhender, qui nous est et restera caché. La foi n'y change rien, si ce n'est bien sûr une promesse qui nécéssite de faire confiance.
Franchement, je n'imagine pas une seconde que nos pensées, prières, bonnes actions, puissent permettre d'accéder plus rapidement à un "paradis". Ce sont des vues humaines (qui ont enrichi l'église catholique au passage ...) Je crois que si Dieu aime les hommes et qu'il a choisi de les sauver, c'est un amour sans limites ni conditions. Le Salut, c'est par la grâce de Dieu, pas par le mérite des hommes.
Ma mère est décédée il y a quelques années. J'étais à Paris chez mon père en décembre, le jour anniversaire du décès de Maman. J'ai demandé à mon père s'il avait fait dire une messe pour ce jour anniversaire, et s'il voulait que je l'y emmène (il a 96 ans).
Un peu gêné, je l'ai senti ainsi, il me dit qu'il fait désormais dire des messes pour maman ailleurs que dans leur paroisse. Où donc ? Je suis très surprise : dans un monastère du centre de la France, réputé pour l'efficacité des messes pour les âmes des défunts ! Je n'ai pas osé demander à mon père comment il avait connaissance de cette "efficacité" ! Le ciel enverrait-il des statistiques ?... J'avoue ma consternation : mon père est un érudit, un grand intellectuel, supérieurement intelligent. Il connait par coeur tous les écrits des Pères de l'Eglise. Et il croit qu'en achetant des prières, ma mère restera moins longtemps au purgatoire ! Mon père a tant hâte de retrouver sa femme qu'il ne devrait pas raccourcir son séjour au purgatoire, cela retardera d'autant leurs retrouvailles ... enfin, cela, je ne lui ai pas dit, cet humour est mal venu !
Ce que j'ai aimé dans votre récit, c'est ce choix d'avoir quelqu'un qui pense à vous au moment de la mort, ce mystère, ce passage difficile. J'aimerais ne pas être seule à ce moment-là, mais accompagnée de quelqu'un qui partage mes valeurs, et me dise "Ne crains pas".

Ladywaterloo a dit…

Anne, je découvre ton message, émouvant et dense, j'aurais bien sur des choses à dire, bavardeuse impénitente, mais je prendrai le temps de maturer tout cela.

j'espère que vous avez passé, tous, de bonnes Pâques.

Ladywaterloo a dit…

Ne pas craindre et faire confiance est en effet le secret mais si vous n'avez accès à ce secret comment y pouvoir y arriver?

Très longtemps j'ai pleuré, désespérée la mort de mon frère aîné, puis celles prématurées de mon père et d'un autre frère jeune adulte. J'ai cru toucher le fond du désespoir et en mourir, j'ai été secourue, à la mort de papa j'ai eu cette chance énorme d'être "consolée par Dieu" et depuis ne plus douter ni de Sa présence ni de la vie après la mort.

Je ne suis pas à fond "catho", ce n'est pas ma spiritualité surtout depuis le retour en arrière de l’Église et son utilisation scandaleuse de l'affectivité et l'infantilisation des croyants.

Le jugement des derniers peut être compris de manière différente. Après avoir aperçu la Vérité, nous serons notre propre juge pas sûr que l'on y gagne au change, la mansuétude de Dieu est infinie, la notre, non.

Dieu ne se montre jamais, respectant notre liberté, à la mort certains d'entre nous, refuseront Dieu et resteront dans ce que l'on nomme "l'enfer". Le purgatoire est un temps où nous continuerons à nous approcher de Dieu en nous débarrassant de nos scories du péché, je ne crois pas que cela soit facile de se pardonner.

Votre père peut aimer telle ou telle spiritualité et faire célébrer des messes car elles lui paraissent plus proche de sa sensibilité. Certains lieux respirent aussi l'éternité à travers leur beauté. Faire célébrer des messes ou prier participe à ce que je crois être la communion des "saints". Votre père fait ce qu'il pense être le mieux et sait probablement aussi qu'il s'humilie ainsi, mais l'humilité fait grandir, aussi. Savoir que l'on pense à vous et que l'on vous aime doit aider, même après la mort, encore faut il avoir la Foi, au pire c'est le pari de Pascal.

Il y a plein de phrases dans les Evangiles que j'aime, et particulièrement celle ci

"Frappez et l'on vous ouvrira"

Il faut frapper et frapper encore, parfois.

Adrian a dit…

Lady Waterloo: puis-je vous demander de quelle manière "avez-vous été consolée" par Dieu?

J'aime bien le côté mystérieux de cette confrérie, et de ce côté que le flambeau de la responsabilité de la Vie et du bonheur se passe continuellement depuis des siècles, depuis toujours...Tout simplement à travers un choix!