jeudi 5 janvier 2012

Premier succès, le coiffeur (la rupture n°3)

 Enfant je fus blonde, avec des très jolis cheveux blondinets comme ont les enfants généralement , maman décida, un jour de septembre de m'emmener chez le coiffeur afin de me couper mes cheveux, j'avais trop de noeuds, la plage, le soleil. Le coiffeur à mon grand désarroi, me fit une coupe de garçon, à peine plus longue que celle de mes frères. Je m'alarmais.

Cela repoussera!  me disaient ils, tous en choeur, je suis tellement jolie les cheveux courts, un visage d'ange!

J'allais entendre des années durant cette antienne, cela repousse, je suis si jolie les cheveux courts. J'étais tellement désagréable avant et après ces scènes de torture coiffeurs, que maman espaçait au maximum les  séances chez le coiffeur. Selon elle, je faisais tout un "cirque" pour rien.  Je pleurais en fait beaucoup, à la maison, avant et après, mais restais relativement docile chez le coiffeur et ne disais rien.

Fin juin, j'ai onze ans, depuis, je crois au moins cinq ans, maman me déguise la tête en garçon, je hais cela. Je pensais qu'elle me laisserait au moins les vacances d'été tranquille et espérais profiter de mes mèches qui commençaient à recouvrir mon front. Mais un jeudi, le rendez-vous  fut pris, je dus suivre ma mère, qui m'emmena chez un coiffeur d'homme très gentil, un vieux monsieur que je n'osais contrarier lorsqu'à la fin, il me montrait dans un miroir ma nuque rasée, en me disant

Cela te plait? Tu es contente?

Je pinçais les lèvres, il me jugeait, probablement, très timide, je ne voulais pas le peiner.


Maman me laissa entre ses mains, en ayant dit:

Très court, comme d'habitude, elle si jolie ainsi!


 Le coiffeur commença à me couper les cheveux, qui tombaient autour du siège, mes yeux se brouillaient, la radio était à fond, je ne pus, à mon grand désarroi, empêcher mes larmes de couler,j'espérais que le bruit couvrirait mes larmes,  mais le coiffeur s'en rendit compte et s’arrêta net, il  coupa la radio en me disant:


Qu'est ce qui ne va pas petite?


C'est un peu comme s'il avait rompu un barrage, je fus torrent, hoquetant, je lui  dis tout, mon refus d'être déguisée en garçon, mon horreur des cheveux courts, tout! Il ne se moqua pas de moi, ni me réprimanda, pensif, il me dit:

Mais tout cela, tu l'as dit à ta mère?


Alors je lui racontais, vraiment,, je crois que je lui ai fait de la peine, il ne souriait plus. Il  reprit alors ses ciseaux  et continua en silence à me couper les cheveux, m'ayant simplement  répondu

Je parlerai à ta mère.


Lorsque maman vint me chercher, je lisais un magazine en l'attendant, le coiffeur avait un autre client, il s'interrompit et me dit

Petite va attendre dehors je dois parler à ta mère.


Qu'est ce qu'elle a fait, encore des bêtises?


Oh, non, ne vous inquiétez pas!


Je sortis,  cinq minutes plus tard, maman me rejoignit  furieuse, maugréant, me traitant de "faiseuse d'histoires" me menaçant d'en parler à mon père. Je baissais la tête coupable et me taisais, j'avais mal fait, et le savais, j'avais rompu le pacte du silence.

Quelques jours avant  la fin de l'été suivant,  maman me prévint qu'on ne me couperait plus les cheveux, mais que je devais me débrouiller toute seule pour me coiffer,  démêler mes cheveux, me débrouiller avec des poux si j'en attrapais et un tas d'autres malédictions. Je n'en croyais pas mes oreilles, de bonheur, le reste ne m’atteint pas.

Trois ou quatre ans plus tard, j'avais les cheveux, aux fesses, et les ai gardé très longtemps si longs, plus jamais n'eus une coupe courte. Je déteste toujours aller chez le coiffeur, n'y vais jamais.

Maman me dit encore, aujourd'hui, et je m'en fous:

Tu était si mignonne avec tes cheveux courts!

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